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Vie spirituelle

La Trinité ou les trois anges à Mambré

Guide de contemplation

  • Introduction

    Ce guide de contemplation de l’icône de la Trinité d’Andreï Roublev est l’adaptation d’un texte transmis par Mme Anne-Marie Chénard lors des Exercices spirituels de Saint Ignace de Loyola dans la vie courante (EVC) au Centre communautaire Jean XXIII en 1994-1996. Ce texte anonyme provient probablement du Centre de spiritualité Manrèse de Québec. J’ai modifié légèrement le texte pour l’adapter à la réalité actuelle. Il a pour but de guider le lecteur ou la lectrice dans la contemplation de l’icône de la Trinité tout en méditant à partir des textes choisis de la Parole de Dieu dans la Traduction œcuménique de la Bible (TOB). Pour cet exercice spirituel, il est nécessaire d’avoir à la disposition constante du regard l’image de l’icône (page 5) qu’il est possible d’imprimer.

    Avant d’entreprendre cet exercice de contemplation, nous transmettons quelques explications sur la démarche et le sens de l’iconographie.

    Victor Bilodeau
    5 février 2021 

  • L’iconographe : celui qui peint les icônes.

    C’est une personne qui est inspirée par l’Esprit saint. Ce sont généralement des moines ou des prêtres ou des laïques engagés profondément dans leur vie spirituelle. Ils préparent leur travail par un jeûne de nourriture et un jeûne du regard. L’icône est la matérialisation de leur prière.

    Mais il ne suffit pas d’être un homme ou une femme engagée dans une démarche de vie spirituelle chrétienne, il faut en plus avoir du talent « pour que leur maladresse ne soit pas une offense à Dieu ». Ces personnes ne sont pas davantage libres de faire ce qu’ils veulent. Ils se soumettent à un canon de lois très strictes reçu de la Tradition. C’est pourquoi il n’existe pas d’icônes identiques, bien qu’elles se ressemblent toutes.

    Enfin, leur art est au service d’une théologie et forcément eux-mêmes doivent être au service de Dieu. Le concile de Moscou précise : « Le peintre doit être plein de modestie, de douceur et de piété; il fuira les propos futiles, les railleries. Son caractère sera pacifique, il ignore l’envie. Surtout, il observera avec une scrupuleuse attention la pureté spirituelle et corporelle ».

    Andreï Roublev est un moine du XVe siècle, un peintre russe de génie que l’Église (orthodoxe) a canonisé en l’appelant : « le saint plein de joie et de clarté ». C’est Saint Nicone, successeur de saint Serge à la tête du monastère de la Trinité de Lagorsk, qui a demandé à Roublev de « représenter la Trinité comme source et exemple de toute unité ». Ceci afin que l’évangile de l’unité soit annoncé face à un monde de division, ce qu’était l’Europe au début de la Renaissance.

    L’icône de La Trinité ou Les trois anges à Mambré peinte en 1411 est l’icône la plus connue de Roublev. Elle est encore largement diffusée de nos jours. Reprenant un thème classique de l’iconographie byzantine, l’hospitalité d’Abraham, Roublev fut le premier à faire disparaître les personnages d’Abraham et de Sarah et à concentrer l’attention sur les trois anges assis au pied du chêne de Mambré. Cette icône est exposée à la galerie Tretiakow en Russie. Il est possible de voir d’autres icônes de Roublev en cliquant sur le lien suivant : https://fr.wikipedia.org/wiki/Andre%C3%AF_Roublev

  • Sens ou théologie de l’iconographie

    Dans les Églises d’Orient, il n’y a pas de tabernacle; le sanctuaire avec l’autel suffit, et devant l’autel un mur avec des ouvertures; ce mur, on l’appelle iconostase. Sur ce mur sont apposées plusieurs icônes. Pourquoi? Parce que ce qui se passe dans le sanctuaire est un mystère, le mystère de la présence de Dieu, invisible. Alors, les icônes devant l’autel et le sanctuaire sont là pour rendre visible le mystère du Dieu invisible. 

    En Occident, nous avons l’ambon pour la Parole de Dieu et l’homélie ou le commentaire de la parole.En Orient, ils ont le chant pour participer à la profondeur du mystère et l’icône, cette image qui dit tout du mystère sans besoin d’explication. En effet, les symboles sont plus profonds que les concepts. 

    En Orient, on vénère solennellement les icônes. Dans plusieurs foyers, on remarque la présence d’un coin d’icône où une veilleuse à l’huile l’honore. On en trouve souvent aux intersections de routes, comme ici pour nos croix de chemin.

    L’icône offre un visage, le visage de Dieu à l’homme de foi. Celui-ci sait lire avec les yeux de foi, et ce visage devient l’occasion d’une rencontre avec une présence, présence du Dieu invisible. L’image plus que le discours renvoie à l’intériorité, ce monde intérieur du cœur, là où habite l’Esprit-Saint qui fait nous écrier « Abba, Père ». Ainsi, ce que les Livres saints annoncent par des mots, l’icône le dit par l’image. Si la Bible rend Dieu présent, de même l’icône rend Dieu présent. Comme on honore la Bible, on honorera l’icône. 

    L’existence de l’icône est liée au sens qu’elle vise, à la théologie. L’icône n’a pas de valeur en elle-même. Toute sa valeur tient dans le seul fait qu’elle conduit à Celui qu’elle représente. Donc, dans l’icône le peintre ne veut pas représenter la personne humaine, mais la personne déifiée, la personne transfigurée, c’est-à-dire sa présence sous un autre mode. 

    Laissons Dieu nous parler, et se rendre présent au fond de nos cœurs par la contemplation de l’icône. Cependant, la principale source de Roublev, c’est l’Évangile de Jean, parce que ce dernier nous transmet d’abondance les paroles où Jésus révèle son intimité avec le Père et l’Esprit.

  • Mise en situation : Qu’avons-nous sous les yeux?

    • Trois personnages, assis autour d’une table, laquelle est apprêtée pour un repas.
    • Les personnages sont allongés plus qu’à l’ordinaire : des corps divinisés, dont l’essentiel est dans l’invisible. De plus, ils portent deux ailes et une auréole : ce sont des êtres surnaturels.
    • Une table, en forme de rectangle, lequel représente toujours le monde, et autour de laquelle ils prennent place. Sur la table on trouve une coupe et dans la coupe un agneau ou un veau, dont les membres sont apprêtés pour la cuisson ou le sacrifice. Ce sacrifice, ou cette offrande représente le don que le Christ a fait de sa vie.
    • Au-dessus des anges, un décor : à droite une espèce de rocher, au centre un chêne liège, à gauche un bâtiment stylisé. Ce sont là les éléments que l’on retrouve dans le récit de Genèse 18, l’apparition de 3 hommes ou anges, à Abraham : un rocher du désert, le chêne de Mambré, une tente, celle d’Abraham d’où on peut entendre le rire de Sara. Enfin, trois hommes mangeant un quadrupède; signe de la première alliance de Dieu avec son peuple.
    • Au pied des anges, un espace; comme une porte d’entrée. On dirait que c’est la place d’Abraham, le père des croyants, qui de loin regarde, écoute. C’est la place de tout croyant. Notre place à chacun.
    • Lecture : Genèse 18, 1-15

    1 Le Seigneur apparut à Abraham aux chênes de Mambré alors qu’il était assis à l’entrée de la tente dans la pleine chaleur du jour. 2 Il leva les yeux et aperçut trois hommes debout près de lui. A leur vue il courut de l’entrée de la tente à leur rencontre, se prosterna à terre 3 et dit : « Mon Seigneur, si j’ai pu trouver grâce à tes yeux, veuille ne pas passer loin de ton serviteur. » 4 Qu’on apporte un peu d’eau pour vous laver les pieds, et reposez-vous sous cet arbre. 5 Je vais apporter un morceau de pain pour vous réconforter avant que vous alliez plus loin, puisque vous êtes passés près de votre serviteur. » Ils répondirent : « Fais comme tu l’as dit. » 6 Abraham se hâta vers la tente pour dire à Sara : « Vite! Pétris trois mesures de farine et fais des galettes! » 7 et il courut au troupeau en prendre un veau bien tendre. Il le donna au garçon qui se hâta de l’apprêter. 8 Il prit du caillé, du lait et le veau préparé qu’il plaça devant eux; il se tenait sous l’arbre, debout près d’eux. Ils mangèrent 9 et lui dirent : « Où est Sara ta femme? » Il répondit : « Là, dans la tente. » 10 Le Seigneur reprit : « Je dois revenir au temps du renouveau et voici que Sara ta femme aura un fils » Or Sara écoutait à l’entrée de la tente, derrière lui. 11 Abraham et Sara étaient vieux, avancés en âge, et Sara avait cessé d’avoir ce qu’ont les femmes. 12 Sara se mit à rire en elle-même et dit : « Toute usée comme je le suis, pourrais-je encore jouir? Et mon maître est si vieux! » 13 Le Seigneur dit à Abraham : « Pourquoi ce rire de Sara? Et cette question : « Pourrais-je vraiment enfanter, moi qui suis si vieille ? » 14 Y a-t-il une chose trop prodigieuse pour le Seigneur? A la date où je reviendrai vers toi, au temps du renouveau, Sara aura un fils. » 15 Sara nia en disant : « Je n’ai pas ri », car elle avait peur. « Si reprit-il, tu as bel et bien ri. »

  • Contemplation : Immersion dans « l’Amour Tout-Puissant »

    Recueillement 

    • Prise de conscience du lieu, l’habiter.
    • Prise de conscience du corps, de la respiration.
    • Disposition intérieure d’offrande et de disponibilité. 
    • Demander la grâce de répondre à l’invitation qui m’est faite de participer au « banquet de l’amour ».

    Me situer face au personnage du centre

    Le personnage du centre est vêtu de pourpre vif, couleur de la royauté. Il domine sur les deux autres parce qu’il est au centre et qu’il est plus haut. Il est source et origine : C’est l’Amour Tout-Puissant, le Créateur. Tout s’origine en lui :

    1 Au commencement était le Verbe,

    et le Verbe était tourné vers Dieu,

    et le Verbe était Dieu.

    2 Il était au commencement tourné vers Dieu.

    3 Tout fut par lui,

    et rien de ce qui fut, ne fut sans lui.

    4 En lui était la vie

    et la vie était la lumière des hommes,

    5 et la lumière brille dans les ténèbres,

    et les ténèbres ne l’ont point comprise.

    Jean 1, 1-5

    « L’Amour Tout-Puissant » est « Créateur et Vie ». Il est vie donnée en abondance, gratuitement, sans cesse :

    Mais Jésus leur répondit : « Mon Père, jusqu’à présent, est à l’œuvre, et moi aussi je suis à l’œuvre. » Jean 5, 17

    Le centre de l’icône se situe entre la main du personnage du centre et la coupe. Dans son axe vertical, il unit l’arbre, ce chêne liège, à la coupe, laquelle est posée sur la table qui représente tout l’univers. La table porte la coupe du sacrifice, offrande parfaite du Christ, réponse parfaite de l’humanité au don d’amour de son créateur. Cette réponse d’amour de l’humanité devient possible dans le Christ, ce Nouvel Adam, qui établit entre le Créateur et ses créatures une Nouvelle Alliance en son sang, par le don de sa vie. 

    En effet, le Premier Adam, celui du jardin d’Eden, le Paradis terrestre, avait trouvé la mort par sa désobéissance, entraînant dans la désobéissance et la mort tous ses frères, lorsqu’il avait mangé du fruit de l’arbre de la vie (Genèse 2, 9) planté au milieu du jardin. Ce manque de confiance en Dieu, Abraham, le Père des croyants, devait le réparer lorsqu’il crut aux promesses de Dieu qui consacrait sa descendance à la perpétuité et scella avec Dieu une première alliance au Chêne de Mambré. Mais voilà qu’en cette ultime et définitive Alliance, la Croix plantée en terre se substitue à l’arbre de vie du jardin d’Eden pour féconder à jamais tout l’Univers du précieux don de sa vie divine et éternelle :

    « …Telle est en effet la volonté de mon Père : que quiconque voit le Fils et croit en lui, ait la vie éternelle; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. » Jean 6, 40

    Rien ne peut donc empêcher la vie de « l’Amour Tout-Puissant » de se communiquer, puisqu’Il se fait Sauveur. Ayant fécondé l’univers, désormais élevé de terre (Jean 12, 32), Il attirera tout à Lui : 

    « …Vous l’avez entendu, je vous ai dit : « Je m’en vais et je viens à vous ». Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je vais au Père, car le Père est plus grand que moi. » Jean 14, 28

    « …2 Dans la maison de mon Père, il y a beaucoup de demeures; sinon vous aurais-je dit que j’allais que j’allais vous préparer le lieu où vous serez? 3 Lorsque je serai allé vous le préparer, je reviendrai et je vous prendrai avec moi, si bien que là où je suis, vous serez vous aussi. » Jean 14, 2-3

  • Me situer face au personnage de gauche

    Si le Père est à l’origine de l’être et de toutes choses contenues dans le cercle des trois, néanmoins il engendre à égalité par rapport à Lui. Le Fils et l’Esprit se reçoivent du Père. C’est pourquoi on remarquera que les trois anges sont absolument semblables; ils possèdent une même nature divine. Cependant, ils se distinguent de l’ange du centre par leurs positions respectives et par leurs gestes. Dans la relation qu’ils ont entre eux, ils sont différents. Donc ils sont égaux : une même nature divine. Mais ils ont entre eux une relation différente : s’expriment différemment, ont une mission d’amour différente. Le Père est source de tout Amour, le Fils et l’Esprit-Saint sont tournés vers nous, vers le monde, pour nous communiquer cet Amour. Ils sont comme les deux mains du Père, par lesquelles il façonne le monde. 

    Le Fils se reçoit du Père, car l’ange central est tourné vers l’ange de gauche qu’il regarde, que dire, il plonge en lui son regard. Tout est dans ce regard; c’est pourquoi l’on se tait. À cette profondeur on atteint l’unité :

    « Moi et le Père, nous sommes un. » Jean 10, 30 

    Mais le Père (dessiné en lignes convexes), qui semble pousser le Fils du coude, s’exprime tout entier dans le Fils (dessiné en lignes concaves), qui semble prêt à accueillir intégralement tout ce que le Père communique :

    « Personne n’a jamais vu Dieu; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, nous l’a dévoilé. » Jean 1, 18 

    Les deux corps semblent imbriqués l’un dans l’autre :

    « … et vous connaîtrez de mieux en mieux que le Père est en moi comme je suis dans le Père. » Jean 10, 38 

    Le Père, par l’inclination de sa tête et du buste, donne l’impression d’autorité. Il semble donner un ordre au Fils, lui donner une mission. Quelle mission?

    Du geste de la main posée sur la Table et indiquant le calice, il désigne l’incarnation et ses conséquences, la mort sur la croix. La nature divine se doit de prendre chair dans le monde, en assumer toute la réalité, à l’exclusion du péché, afin de l’introduire dans l’amour trinitaire. Et le Fils de répondre par un geste de la main son acceptation, cependant hésitante :  car il tend la main pour prendre ce que le Père lui indique, mais, en même temps, il recule vers l’arrière, comme saisi de crainte :

    7 Les juifs lui répliquèrent : « Nous avons une loi, et selon cette loi il doit mourir parce qu’il s’est fait Fils de Dieu ! » …

    10 Pilate lui dit alors : « C’est à moi que tu refuses de parler! Ne sais-tu pas que j’ai le pouvoir de te relâcher comme j’ai le pouvoir de te faire crucifier? » 11 Mais Jésus lui répondit : « Tu n’aurais sur moi aucun pouvoir s’il ne t’avait été donné d’en haut; et c’est bien pourquoi celui qui m’a livré à toi porte un plus grand péché. » Jean 19, 7-11 

    Car c’est par la croix, qui traverse la coupe, que le Fils doit regénérer le monde : telle est la mission que le Père confie au Fils.

    « Dieu, en effet, a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils, son unique, pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle » Jean 3, 16

    Le Fils, c’est l’Amour Tout-Puissant qui reçoit tout du Père pour tout lui transmettre. Il vient dans notre monde, envoyé par le Père, pour tout récapituler en lui. Par son sacrifice, il devient l’offrande parfaite et définitive d’un monde renouvelé, offrande pleinement agréée par le Père. Le Christ ressuscité nous communique à chaque instant tout ce qui vient du Père, et continuellement nous remet à lui, nous offre à lui.

    Jésus lui dit : Je suis le chemin et la vérité et la vie. Personne ne va au Père si ce n’est par moi. Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. Dès à présent vous le connaissez et vous l’avez vu. » Jean 14, 6

    Il nous a fait connaître le mystère de sa volonté, le dessin bienveillant qu’il a d’avance arrêté en lui-même pour mener les temps à leur accomplissement : réunir l’univers entier sous un seul chef, le Christ, ce qui est dans les cieux et ce qui est sur la terre. Éphésiens 1, 9-10

  • Me situer face au personnage de droite

    Le corps de l’ange de droite est tourné vers les deux autres et semble les accueillir tous les deux. La tête inclinée, il semble écouter avec attention ce qu’ils se disent, comme pour le méditer. Son regard est à la fois tourné vers le haut pour rejoindre le croisement de regard du Père et du Fils, et tourné vers le bas, la coupe et la table, qu’il semble envelopper, prêt à l’envahir. Son corps est courbé sur le monde, il semble prêt à partir. L’Esprit qui procède du Père et du Fils est l’expansion, la diffusion sur le monde des fruits de ce dialogue d’amour entre le Père et le Fils : 

    Lorsque viendra l’Esprit de vérité, il vous fera accéder à la vérité tout entière…

    Il me glorifiera car il recevra de ce qui est à moi et il vous le communiquera. Tout ce que possède mon Père est à moi; c’est pourquoi j’ai dit qu’il vous communiquera ce qu’il reçoit de moi.   Jean 16, 13- 14

    Le tendre regard d’amour qui unit le Père et le Fils, l’Esprit-Saint nous y fait participer au plus intime de nous-mêmes : 

    Le Père aime le Fils et il a tout remis en sa main. Jean 3, 35

    Ce qu’Il entend du Père et du Fils, Il nous le révèle : 

    Lorsque viendra l’Esprit de vérité, il vous fera accéder à la vérité tout entière, car il ne parlera pas de son propre chef, mais il dira ce qu’il entendra et il vous communiquera tout ce qui doit venir. Jean 16, 13

    De sa main effilée, l’Esprit désigne le monde, car c’est au monde qu’il doit porter l’intimité de l’Amour Trinitaire. Un Amour Tout-Puissant qui se donne au monde. En effet, le Père est invisible, le Fils, les Apôtres l’ont vu de leurs yeux, entendu, contemplé, touché de leurs mains, mais à nous, les croyants, le seul des trois qu’il nous soit donné de posséder en nous, c’est l’Esprit-Saint : 

    Moi, je prierai le Père; il vous donnera un autre Paraclet qui restera avec vous pour toujours. C’est lui l’Esprit de vérité, celui que le monde est incapable d’accueillir parce qu’il ne le voit pas et qu’il ne le connaît pas. Vous, vous le connaissez, car il demeure auprès de vous et il est en vous. Jean 14, 16-17

    Ou bien ne savez-vous pas que votre corps est le temple du Saint Esprit qui est en vous et qui vous vient de Dieu… 1 Corinthiens, 6-19

    Si l’Esprit-Saint nous communique ce qui vient du Père et du Fils, c’est encore par lui que nous avons accès à l’intimité divine. C’est par lui que nous sommes reliés à l’Amour Trinitaire. Il est l’agent de notre transformation en Amour plénier, nous rendant semblables à l’image de l’Unique Fils Bien-Aimé. Parce qu’il travaille la création, dont l’homme est la fleur, l’Esprit qui l’habite, le fait converger, de palier en palier, vers des états de plus en plus spirituels: 

    Jésus lui répondit : « En vérité, en vérité, je te le dis : nul, s’il ne naît d’eau et d’Esprit, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l’Esprit est esprit. Ne t’étonne pas si je t’ai dit : « Il vous faut naître d’en haut. » Le vent souffle où il veut, et tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d’où il vient, ni où il va. Ainsi en est-il de quiconque est né de l’Esprit. Jean 3, 5-8

    22 Nous le savons en effet : la création tout entière gémit maintenant encore dans les douleurs de l’enfantement. 23 Elle n’est pas seule : nous aussi, qui possédons les prémices de l’Esprit, nous gémissons intérieurement, attendant l’adoption, la délivrance pour notre corps. 24 Car nous avons été sauvés, mais c’est en espérance. Or, voir ce qu’on espère n’est plus espérer; ce que l’on voit, comment l’espérer encore? 25 Mais espérer ce que nous ne voyons pas, c’est l’attendre avec persévérance.  Romains 8, 22-25

  • Prendre ma place à la table du banquet de « l’Amour Tout-Puissant »

    Que servirait de s’émerveiller devant une belle vision, si elle devait rester lettre morte? Aussi, l’icône, par son renversement de perspective vient nous chercher. Elle nous invite à entrer dans cet espace, au cœur de l’Amour Trinitaire.

    La perspective inversée fait que les lignes convergent vers le spectateur qui se trouve devant. Elles convergent pour ainsi dire jusqu’en son cœur, là où la foi donne vie au mystère de l’amour. L’estrade, les sièges et les corps obéissent à cette perspective inversée, parce que l’icône n’a de sens que si elle prend vie en celui ou celle qui la contemple. 

    Ainsi, comme Abraham, le croyant, nous avons notre place au cœur de la Trinité. Comme dans la Parabole du Roi qui invite au banquet, Luc 14, 15-24, nous sommes invités au repas de l’Amour (Parabole des invités remplacés par les pauvres).

    15 En entendant ces mots, un des convives dit à Jésus : « Heureux qui prendra part au repas dans le Royaume de Dieu » 16 Il lui dit : « Un homme allait donner un grand dîner et il invita beaucoup de monde. 17 À l’heure du dîner, il envoya son serviteur dire aux invités : « Venez, maintenant c’est prêt. »

    18 « Alors ils se mirent à s’excuser tous de la même façon. Le premier lui dit : « Je viens d’acheter un champ et il faut que j’aille le voir; je t’en prie, excuse-moi ». 19 Un autre dit : « Je viens d’acheter cinq paires de bœufs et je pars pour les essayer; je t’en prie, excuse-moi. » 20 Un autre dit : « Je viens de me marier, et c’est pour cela que je ne puis venir ». 21 A son retour, le serviteur rapporta ces réponses à son maître. Alors, pris de colère, le maître de maison dit à son serviteur : « Va-t’en vite par les places et les rues de la ville, et amène ici les pauvres, les estropiés, les aveugles et les boiteux ». 22 Puis le serviteur vint dire : « Maître, on a fait ce que tu as ordonné, et il y a encore de la place ». 23 Le maître dit alors au serviteur : « Va-t’en par les routes et les jardins, et force les gens à entrer, afin que ma maison soit remplie. 24 Car, je vous le dis, aucun de ceux qui avaient été invités ne goûtera de mon diner. »

    Et quand nous entrons par cette brèche, ouverte par l’Esprit-Saint, dans le mystère de l’Amour Trinitaire, nous n’entrons pas seuls, mais avec ceux que nous portons dans notre amour. 

    Et au banquet de l’amour, nous ne nous présentons pas les mains vides. Nous portons avec nous tous les bons fruits de la création. Tous les dons reçus, nous les apportons en reconnaissance et dans la joie de l’action de grâce. 

    Nous-mêmes, nous nous offrons pour rendre gloire à Dieu de la « merveille que nous sommes » (Psaume 138, 14). 

    C’est aussi notre vie entière, notre avenir qui se trouve offert pour être transformé par l’Esprit-Saint : 

    Comment rendrai-je au Seigneur

    Tout le bien qu’il m’a fait?

    J’élèverai la coupe du salut,

    J’invoquerai le nom du Seigneur. 

    Psaume 116, 12-13

  • Prière personnelle d’adoration

    Comme Abraham je me tiens là près d’eux.

    • Je les regarde
    • Je me laisse regarder
    • J’écoute
    • J’entre en dialogue avec eux.